Comment créer de bons personnages ?

un homme embrasse une femme

Des personnages comme si on y était...

Vos personnages sont vos créatures, vous devez tout savoir, tout imaginer, y compris ce qu'on ne voit pas dans le roman. Et ils doivent passionner vos lecteurs. Une gageure.

La fiction est extraordinaire : elle permet de créer des gens. Écrire un roman, c'est donner vie à une multitude de personnages. Mais ce privilège s'accompagne de quelques devoirs : pour créer vos personnages, vous allez vous poser un nombre considérable de questions, et y répondre. On a recensé plus de 4000  personnages chez Balzac, plus de 400 chez Proust… Alors un peu de courage !

Connaître ses personnages

Vous allez passer beaucoup de temps avec vos personnages, il vous faut bien les connaître, car vous allez devoir donner au lecteur de bonnes raisons de s'intéresser à eux. Dans ses "lettres à un jeune auteur" (2018), Colum McCann explique : "enfin de compte, il faut que tu les connaisses autant que moi-même. Que tu saches non seulement ce qu'ils ont mangé, ce matin au petit déjeuner, mais aussi ce qu'ils avaient envie de manger. Cette petite tranche de bacon littéraire n'apparaîtra pas forcément dans ton récit, mais il est nécessaire que tu y aies pensé. En fait, tu dois avoir sur le bout de la langue la réponse à toutes les questions. Où est née l'héroïne ? Quel est son premier souvenir ? " Comme Colum McCann, vous devez tout connaître. Comme Nicolas Gogol, aussi, qui voulait savoir comment son personnage nouait sa cravate. Pour cela vous allez créer un outil formidable : la fiche personnage. Elle rassemble tout ce que vous savez. Même si cela ne vous sert pas dans le roman. C'est la garantie d'avoir des personnages de chair et pas des silhouettes.

Le nom des gens

En premier lieu, un personnage doit avoir un nom. L'alliance prénom-nom en dit tellement sur le personnage. Avec un prénom et un nom, on découvre une époque, une classe sociale, une histoire familiale. Patrick Modiano collectionne les annuaires téléphoniques des années 1950 - 1960… Tout est là ! Trouver des noms de personnages est très difficile. Il faut en particulier veiller à ce que le lecteur ne risque pas de les confondre. Ne se demande pas au bout de quelques pages : "Mais c'est qui celui-là ?" Avec le nom vient le milieu, le contexte, l'environnement, la famille, l'éducation, le travail…

Le physique

Le physique n'est pas si important. Souvent un romancier débutant consacre de longs passages au physique (généralement avantageux) de ses personnages principaux. Mais le lecteur ? Quelle place pour le lecteur ? Bien sûr, s'il s'agit de Quasimodo, on comprend qu'il faille donner quelques indices… Mais, sur la question du physique, le lecteur doit pouvoir remplir les vides. Ainsi, de nombreux comédiens ont interprété le rôle du commissaire Maigret. Quelle ressemblance entre Bruno Cremer et Gérard Depardieu, pour citer les plus récents ? Aucune. Mais Simenon a donné au lecteur des points de repère qui dépassent le physique. Il est toutefois un aspect à ne pas négliger : la voix de votre personnage, son a parlé. C'est indispensable pour réussir vos dialogues.

Le physique

Même si votre roman commence lorsque votre personnage a 30 ans, vous devez savoir ce qui lui est arrivé, connaître son enfance, les événements marquants de sa jeunesse, ses loisirs… Créer des personnages, c'est être son propre détective.

Sympathiques ou pas, ils doivent être passionnants

Votre personnage principal peut être monstrueux, il ne doit pas être mièvre. Quel est son trait de caractère le plus présent, quelles sont ses ambitions, ses craintes, sa philosophie de vie ? Élisabeth Georges parle du "besoin vital" des personnages : besoin d'approbation, de nouveauté, de sensations fortes ? Besoin d'être rassuré, admiré, de se sentir utile ? Comment réagira-t-il en situation de stresse ? Le lecteur doit avoir envie de le comprendre, d'en savoir plus. Grenouille, dans "le parfum" Merteuil, dans "les liaisons dangereuses", ne sont pas sympathique. Ils sont passionnants.

Tout cela, vous allez bien sûr le montrer. Pas le raconter. Ce sont les actes du personnage qui parleront de lui. Stephen King le dit "je me suis efforcé de ne jamais dire "Annie paraissait déprimée ce jour-là". Si en revanche, je suis capable de vous montrer une femme silencieuse, aux cheveux sales, qui se bourre compulsivement de gâteaux et de bonbons, c'est vous qui en tirerez la conclusion qu'Annie est dans un moment dépressif de cycle maniaco-dépressif, et j'ai gagné"

(Écriture. Mémoires d'un métier).

Vos personnages ne sont pas vos enfants

Vous pouvez les bousculer un peu. L'ironie dramatique permet au lecteur d'en savoir plus que les personnages : le lecteur sait que la police n'arrivera pas à temps devant la cabine téléphonique d'où un personnage appelle au secours. Vous pouvez les faire souffrir, mourir. Mais vous n'êtes pas obligé de suivre Flaubert qui vomissait en administrant de l'arsenic à Emma.

Vos personnages vont changer

Les auteurs que j'accompagne me disent parfois : "mais le personnage va évoluer, au cours du roman. Pourquoi donner tant de précisions si on ne s'en sert pas ?" Bien sûr, le personnage va changer. C'est un enjeu majeur du roman ! Mais c'est justement pour cette raison que vous devez tout savoir. Votre personnage va réagir à des événements, en provoquer d'autres. S'il décide de quitter sa famille, son milieu, vous savez pourquoi. Et vous aurez donné au lecteur les clés pour le comprendre. Les interactions entre vos personnages doivent respecter la cohérence interne de chacun. Si vous vous dites : "nom, mon héroïne ne peut pas faire ça", alors, il faut revoir sa fiche ou l'intrigue.

Frédérique Anne, HS - Lire Magazine littéraire - écrire & se faire éditer.

 

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